Corne de l'Afrique : l'aide des pays donateurs n'est pas à la hauteur des besoins

Publié: 20th juillet 2011

Selon Oxfam, 800 millions de dollars manquent pour l'intervention humanitaire face à la crise en Afrique de l'Est

Alors que les efforts mis en oeuvre pour juguler la catastrophe en Afrique de l'Est patinent, nombre de gouvernements de pays riches se rendent coupables de négligence volontaire : à l'heure actuelle, 800 millions de dollars manquent à l'appel, affirme Oxfam. Avec l'intensification de la crise, les donateurs internationaux et les Etats de la région doivent renforcer de toute urgence leur réponse.

Sur le milliard de dollars supplémentaire nécessaire pour face à la crise humanitaire, seuls 200 millions de dollars ont été fournis. La France, en particulier, n'a toujours fait aucune annonce.

Les taux de malnutrition enregistrés dans les camps de Dolo Ado, qui accueillent des réfugiés Somaliens en Ethiopie, sont quatre fois plus élevés que le seuil d'urgence. Dans certaines régions, 60 % à 90 % du bétail est déjà mort. Les financements pour l'eau, l'hygiène, la nourriture et les aides pour l'agriculture et l'élevage sont particulièrement faibles. Alors que la plupart des organisations humanitaires éprouvent de grandes difficultés face à une crise d'une telle ampleur, il est intolérable que des donateurs et pays riches ne soient pas capables de se montrer plus généreux.

"Le temps est compté pour éviter de nombreux morts. La communauté internationale ne peut pas rester immobile et regarder cette tragédie se dérouler sous ses yeux. Trop de temps a été pris pour réaliser la sévérité de la crise, désormais il n'y a plus aucune excuse à l'inaction des pays donateurs", estime Fran Equiza, directeur régional en Afrique de l'Est d'Oxfam.

Pour l'heure, le Royaume-Uni s'est engagé sur de nouvelles promesses de dons. Pour combler le manque de financements, il est indispensable que d'autres grands pays donateurs puissent fournir des contributions similaires. La réponse européenne s'est montrée particulièrement lente, avec des bailleurs comme l'Italie ou le Danemark n'ayant pris aucun engagement supplémentaire. Le gouvernement français a bien eu des paroles particulièrement fortes sur le sujet, allant jusqu'à convoquer, en tant que Présidence du G20, une réunion d'urgence de la FAO à Rome lundi prochain, mais ils n'ont pas à ce jour accompagné leurs déclarations d'un apport financier. D'autres pays donateurs comme l'Allemagne et l'Espagne doivent compléter leurs contributions initiales, assez faibles, au plus vite. Vu l'ampleur de la crise, les bailleurs dans le reste du monde devront également payer leur part.

Pour briser le cycle qui, d'une crise à l'autre, maintient les plus démunis dans un état de vulnérabilité permanente, une remise à plat du système d'aide internationale est indispensable. Si la sécheresse sévère - l'année la plus sèche depuis plus de 60 ans dans certaines parties de la région - est bien la cause de l'ampleur unique de cette crise humanitaire, l'inaction politique contribue à la crise tout autant que la nature. Pour sauver des vies et protéger les moyens de subsistance, l'aide d'urgence doit certes être augmentée, mais, en amont, les Etats et les bailleurs de fond doivent également faire davantage pour s'attaquer aux causes structurelles de la vulnérabilité.

"Tout doit être mis en œuvre pour qu'une crise de cette ampleur ne se produise plus. Rien de tout cela n'est inéluctable et des solutions existent. Les zones les plus touchées ont subi des décennies de marginalisation et de sous-développement économique. La situation serait aujourd'hui différente, ils seraient nombreux à ne pas souffrir de la famine, si davantage de mesures avaient été prises en amont", affirme Fran Equiza.

La capacité des populations à affronter la sécheresse a bien souvent été affaiblie par différents facteurs, telles les politiques foncières qui limitent l'accès aux zones de pâturage. En Somalie, le conflit continu a détruit la plupart des infrastructures du pays et a accentué les flux migratoires, poussant cette année 135 000 Somaliens à fuir. Des dizaines de milliers de personnes supplémentaires ont dû se réfugier à Mogadiscio, où la guerre fait rage.

En savoir plus

Lire le rapport (en anglais) : East Africa Food Crisis: Poor rains, poor response

L'intervention humanitaire d'Oxfam face à la crise alimentaire en Afrique de l'Est

Le temps est compté pour éviter de nombreux morts. La communauté internationale ne peut pas rester immobile et regarder cette tragédie se dérouler sous ses yeux.
Fran Equiza
Directeur régional d'Oxfam en Afrique de l'Est

Notes aux rédactions

D'après les Nations unies, les besoins humanitaires pour la région cette année s'élèvent en tout à 1,87 milliard de dollars. Jusqu'ici, 45 % de cette somme ont été financés. Plus d'un milliard de dollars manquent encore, soit respectivement 332 et 296 millions pour répondre aux appels à dons des Nations unies pour le Kenya et pour la Somalie, et 398 millions pour l'appel lancé par le gouvernement éthiopien. Au cours des deux dernières semaines, il y a eu de nouveaux engagements à hauteur de 205 millions de dollars, dont le Royaume-Uni qui s'est engagé à hauteur de 145 millions de dollars - près de 15 % de la somme nécessaire, Ce qui laisse encore 800 millions à trouver.

Jusqu'à présent, l'Union européenne a promis 8 millions de dollars et devrait annoncer plus dans les prochains jours. L'Espagne va donner près de 10 millions de dollars, l'Allemagne environ 8,5 millions. La France n'a pas encore pris d'engagement. Le Danemark et l'Italie ont indiqué qu'ils n'avaient pas de nouveaux financements significatifs disponibles.

Contact

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